Cet espace rassemble des informations sur la communication terrioriale,
prioritairement sur la promotion de la ville et la production de son image.

Les thèmes de la Culture, des Projets urbains, de la Proximité, du Patrimoine,
du Développement économique ou touristique, de la Durabilité sont souvent traités, essentiellement par les villes et métropoles mais parfois aussi
avec d'autres types d'espaces, quelles que soient les échelles.

L'internationalité bretonne

Avec l'association Bretagne international, le marketing territorial proposé par les acteurs bretons s'intéresse aux entreprises locales pour les aider à se développer dans le monde.
Le positionnement de l'association n'est pas celle d'une agence de développement économique qui doit attirer les entreprises à l'exemple d'IDEA 35 pour le département d'Ille-et-Vilaine ou de Nantes métropole développement pour la capitale ligérienne. Il s'agit d'accompagner les entreprises bretonnes dans leur volonté de travailler avec et vers l'extérieur.

Cerner les marchés cibles et les réseaux de distribution, organiser les financements pour s’ouvrir à l’international, maîtriser la réglementation internationale, faciliter les contacts, aider à l’interprétariat, suivre au démarrage ailleurs, monter les dossiers…, l’aide semble importante. Par exemple, dans un salon agricole d'Atlanta, un espace loué par Bretagne International est proposé aux entreprises intéressées, avec un commercial présent pour organiser les contacts.
Autant d'outils de marketing territorial qui répondent aux besoins des entreprises.

Parallèlement, la Bretagne rappelle dans sa presse territoriale (qui n’en a pas les codes mais ressemble plutôt à un dépliant promotionnel par le contenu et la forme) son attractivité plutôt forte. Dans le n°10 de novembre 2008, les arguments de sa croissance économique seraient dûs à la qualité de l'environnement breton qui facilite le cadre de vie ; la formation de la masse salariale locale, prouvée par des chiffres ; les infrastructures dont "des aéroports répartis sur l'ensemble du territoire" (il n'est pas précisé que ce semis est au détriment d'un aéroport puissant qui aurait des liens internationaux nombreux). Rien de bien novateur parmi des arguments repris par l'ensemble des territoires, de Munich à Vancouver ; de Copenhague à Tunis...

Toutefois est reconnu le manque de notoriété de la Bretagne dans le monde, tandis que souvent de nombreux acteurs affirment que la Bretagne et son identité son connues (il est vrai que sa forme géographique est un atout de visibilité et de localisation sur une mappemonde).
L'UEB est mise en avant mais les autres régions françaises font de même avec des PRES plus ou moins puissants, tout comme les 4 pôles de compétitivité (dont aucun n'est mondial) sont noyés parmi les 70 autres pôles français qui devaient être une quinzaine avant l'essaimage (électoral ?) de N. Sarkozy.
Un dernier atout est mis en avant mais là encore rien d'original : la capacité des acteurs à travailler en réseau. Est alors présentée l'agence économique de Bretagne, l'une des dernière instance du CRB qui participe à mettre en réseau.

Enfin, un biscuitier japonais témoigne dans un encart son choix de racheter une chocolaterie de Quiberon car "les valeurs de sérieux, de motivation, d'implication des japonais" se retrouvent dans la manière de travailler des bretons.
Déjà Jacques Le Gall, secrétaire général du groupe Canon France expliquait en 2003 que sur les cinquante sites sélectionnés pour implanter leur entreprise, ils ont trouvé en Bretagne « une population qui avait des valeurs appréciées des japonais : travailleurs avec un sens quasi atavique de l’ouvrage bien fait et de la responsabilité ».
L'argument est là aussi habituel, reste à observer s'il es vrai.

Les 8 courtes brochures en pdf produites par le site internet de Bretagne international, intitulée "Bretagne, Land of excellence and innovation" traitent des pôles d'excellence bretons : Activités industrielles et le cluster RFID (radio frequency identification), l'agroalimentaire, l'énergie éolienne notamment liée à la mer (hydrolienne), les biotechnologies, la construction navale et l'habituel thème du développement durable sont tous présentés en anglais. Une fiche sur les TIC cible le marché chinois avec une plaquette dans cette langue.

La fiche plus générale de 4 pages reprend tout ces thèmes, au fil des photos évocatrices de l'activité économique bretonne. Quelques sphères symboliques peuvent être distinguées au travers des visuels choisis :

- l'aéroport peu grandiose de Rennes ; le TGV > pour l'accessibilité
- la belle plage de Dinard et ses villas ; les menhirs ; un paysage maritime naturel ; une façade d'une maison rennaise à pan de bois ; une entrée de maison typique (bleu et blanc) > pour le patrimoine
- un petit phare sur un port ; un paysage de petit port > pour la typicité
- un surfeur sur la plage > pour concurrencer les baies landaises
- une prairie et ses vaches ; une truie qui nourrit ses petits dans un cadre industriel > pour l'activité agricole
- Océanopolis et le port adjacent en vue aérienne > pour la maritimité
- deux visuels d'activités de fret portuaire > pour l'activité maritime
- la fabrique automobile à la chaîne du groupe PSA > pour l'industrie
- un visuel de galerie commerçante > pour l'urbanité quotidienne
- puis quelques images un peu moins évidentes : une caméra qui évoque l'activité médiatique de la région (peut-être TV Breizh ?), un ingénieur-chercheur qui agite un outil de mesure, des légumes sur un bateau avec un phare en fond d'image.

Sur les photos stéréotypées, le phare comme objet central ou objet de décor est visible trois fois... et c'est le même à chaque fois. Est-ce une spécificité paysagère de la Bretagne ou bien la campagne photographique n'avait pas beaucoup de budget pour une mobilité et toutes les photos ont été prises au même endroit ?

Enfin, sur d'autres documents pdf, plusieurs cartes "Ils sont déjà en Bretagne" témoignent de l'implantation des entreprises étrangères, par nations et par secteur d'activités.

Un film de 2 minutes au sein du site internet présente les acteurs qui sont derrière l'instance. Avec un jingle qui montre un globe terrestre et des buildings, l'interview commence avec un journaliste au faciès breton qui interview tour à tour les 3 porteurs de BI. Les 3 hommes en manque de jeunesse incarnent le caractère sérieux et sage d'une association expérimentée avec des acteurs bien insérés dans les réseaux. L'un d'eux est le Président du Conseil régional, ce qui montre l'appui des pouvoirs publics.
Le contenu de ce film court est solide, même si la performativité est toujours présente : "Il faut une stratégie pour BI" dit l'un alors le journaliste se tourne vers le Président du CRB. Dans son laïus, ce dernier répond que la stratégie du Conseil régional repose sur la structure BI. Ok, les instances travaillent ensemble mais en réalité, chacun se renvoie la balle pour noyer qui a le pouvoir sur qui.

Un défaut tout de même, c'est le rythme de parole des interlocuteurs, légèrement trop rapide, qui aboutit à une mauvaise énonciation de la part de chacun pour le mot principal du film "Bretagne international", alors qu'il devrait être dit lentement pour que l'auditeur l'intègre clairement. C'est comme s'ils n'étaient pas habitués à prononcer la formule...

La Bretagne met en place des outils pour aider les entreprises bretonnes à s'internationaliser mais elle ne propose rien d'innovant, elle fait comme ailleurs.
Le label Produit en Bretagne n'est pas mentionné (sont-ce les mêmes acteurs ?), ni aucune spécificité territoriale, pourtant tellement nécessaire à l'échelle mondiale. Seuls quelques visuels distinguent la Région au phare unique. Le branding territorial n'a aucune place dans les actions d'acteurs régionaux, pourtant à Paris, la Breizh touch met en avant sa singularité. Cette dernière n'existe t-elle que dans le cadre national ? Fait-elle peur ou ridicule au-delà ? Est-ce un bon levier à l'extérieur de la France ?

La perte du Grand Prix du Canada pour Montréal

Le 7 octobre 2008, un coup d’éclair jaillit sur Montréal quand elle apprend que son événement phare, le Grand Prix du Canada lui est retiré en faveur des villes du Sud. En 2009, une épreuve nouvelle de Formule 1 est prévue à Abou Dhabi et les dates de Montréal sont prises par le Grand Prix de Turquie à Istanbul. Istanbul continue son ascension en matière de ville internationale : capitale européenne de la culture en trinôme avec la plus grande ville d’Europe Essen et la ville hongroise Pècs en 2010, elle est en évolution positive pendant que d’autres villes ont des difficultés sur le plan sportif : le Grand Prix d’Australie donne une dette de 150 millions de dollars depuis 2 ans à Melbourne et l’Etat de Victoria. D’autres Grand Prix célèbres sont morts tels ceux de Buenos Aires, Estoril (Portugal), Imola et Bologne.

En même temps que Montréal, le retrait du Grand Prix de France, située près de Nevers, est lui aussi retiré du calendrier. La course française a, sauf en 1955, toujours été présente parmi les courses internationales. Le choc n’a pas lieu chez les français qui ne veulent plus financer ce projet coûteux. Ils sont invités à proposer un autre site plus prestigieux que Nevers. Disneyland semble favori pour 2011, ce qui renforcerait le rayonnement parisien.

Ce qui est étonnant, c’est la différence de réaction entre la France et le Québec pour une même situation.

Déroulement de la perte du Grand Prix

Depuis 1967, le Grand Prix du Canada fait partie des courses considérée comme championnat du Monde et c’est seulement depuis 1978 que la course se tient à Montréal (auparavant elle était Bowmanville en Ontario).

Le 22 octobre 2008, le maire et deux ministres québécois et canadiens s’envolent pour Londres afin de négocier la dizaine ou vingtaine de millions qui manquerait pour l’organisation de l’événement. Face à eux, Bernie Ecclestone, décrit comme un « grand manitou », « redoutable négociateur », « homme d’affaire habile », « tête de cochon », « monstre affamé », « vieux grigou » avec des photos peu flatteuses… la presse montréalaise le résume à un commercial qui fait de l’argent et rien d’autre. L’homme d’affaire essaierait de récupérer le maximum d’argent dans cette rencontre, penchant simplement en faveur de la ville la plus offrante. « D’une humeur maussade […] Il s’est engouffré dans ses bureaux sans se retourner ». Tout est fait pour le diaboliser. La photo du journal La presse le jour de l’annonce finale le 17 novembre est éloquente. La Une titre : « L’insatiable Ecclestone. Montréal perd son Grand Prix ».

Au départ de cette affaire, B. Ecclestone justifie l’abandon de Montréal par des dettes impayées de promoteurs locaux depuis 3 ans. Et ce dans un contexte ou la Formule 1 est en crise et cherche de l’argent, en ce sens, elle fait appel au plus offrant. Sur les 175 millions de dollars que réclamme B. Ecclestone, les pouvoirs publics (Montréal, province du Québec, nation du Canada) ne proposent que 110 millions de dollars.

Pourtant des efforts ont été fait puisqu’un paddock de 4,5 millions $ a été financé par les pouvoirs publics canadiens et l’office de tourisme de Montréal en 2008 après que B. Ecclestone ait critiqué la décrépitude des installations du circuit Villeneuve.

Mais les écuries sont attachées à l’épreuve, d’autant que c’est la seule vitrine nord-américaine pour Toyota, BMW, Honda, Ferrari et Mercedes. Outre les salons de l’automobile de Détroit et de Montréal qui ont lieu en 2009 en même temps (! – au détriment de Montréal puisque Détroit est le siège des 3 entreprises automobiles américaines), les marques d’automobile ont peu l’occasion de montrer leur puissance et faire rêver le consommateur.

Mais selon B. Ecclestone, les médias sont mondiaux et une course à Istanbul se voit aussi à Montréal, même si les contrats pendant la course peuvent se jouer en Amérique du Nord.

Face à la demande de rallonge financière, les pouvoirs publics locaux ne sont pas sûrs de soutenir l’événement car ils veulent être sûrs des retombées économiques. Les chiffres circulent : 15 millions de dollars de retombées directes (billets, pubicités…), 75 à 100 millions de retombées fiscales pour le pays et la province selon les années.

La rue Crescent est le centre névralgique de l’événement. Ses commerçants ont proposé, croyant peu aux capacités des politiques de Montréal, une aide financière pour conserver la course. Déjà en 2003, le Grand Prix était menacé et les commerçants avaient amassé 200 000 $ pour sauver l’épreuve canadienne.

Le ministre Michael Fortier a avancé les arguments de la garantie de gradins pleins comme chaque année au sein d’un marché de l’automobile solide, tandis que la population des nouvelles villes d’accueil (« Chine ou Barheïn ») sont indifférentes aux courses de Formule 1.

Une semaine après la rencontre londonienne, deux pistes de financement privées sont annoncées sous forme de rumeur : le propriétaire du club de hockey de Montréal George Gillett et l’homme d’affaire Guy Laliberté, la fierté québécoise avec son cirque du soleil. Ce dernier aime le Grand Prix et a l’habitude de donner de somptueuses réceptions dans sa villa pendant l’événement. Il est un ami de B. Ecclestone et ce dernier avait par le passé proposé à G. Laliberté d’organiser le Grand Prix à Las Vegas.

Au fil des jours, avant le couperet fatal, les acteurs touristiques de l’ensemble du Québec sont mobilisés à travers la presse et la rivalité métropole/ région est atténuée, chacun étant conscient de l’apport de l’événement sur le plan économique.

Les québécois, plus frileux par ses temps de crise économique, sont 77% à refuser que les pouvoirs publics paient une rallonge financière. Les 30 millions de dollars annuel à mettre sur la table sont alors récupérés par tous les acteurs qui imaginent de nouvelles pistes avec d’autres priorités que le sport. D’autant qu’il n’est pas prouvé que la course automobile draine tant de personnes à Montréal. Peut-être que ceux qui sont dans la ville au moment du Grand Prix le serait tout autant sans la course. Difficile d’évaluer l’impact des grands événements.

Lorsque les pouvoirs publics refusent d’être les promoteurs de l’événement, la question du financeur se pose. Est donc envisagée une forme nouvelle que pourrait prendre l’entité porteuse de l’événement. Un OSBL (organisme sans but lucratif) pourrait être créé, comme c’est déjà le cas pour le festival du Jazz et le festival Juste pour rire, les deux autres vecteurs de l’image événementiel de la ville.

Le dénouement a lieu le 16 novembre. Changement d’ambiance de la part de la presse qui critiquait l’incapacité des politiques. La Presse analyse la situation comme une « sage décision » puisque « La voracité de Bernie Ecclestone nous a fait épargner 50 millions ». Tout à coup, la sanction devient une bonne piste : « On comprend pourquoi Guy Laliberté et George Gillett ont refusé d’embarquer dans ce piège à cons ». Pour conserver leur grandeur et refuser le déclin symbolique, les sous-titres appuient l’idée que « La France et le Canada, deux membres du G8, disent non à Ecclestone ».

Les pertes financières via l’événement sont finalement estimées à 75-80 millions de dollars par an. Les commerçants de la rue Crescent sont particulièrement déçus, notamment l’un des restaurant qui était le fief de la formule 1.

Quelques jours après, certains commerçants tentent encore quelques sauvetages en sollicitant la population montréalaise à s’impliquer (financièrement ?) et en demandant aux constructeurs automobiles de faire du lobbying auprès de B. Ecclestone. Avec une perte de 15 à 20% de leur chiffre d’affaire, les commerçants de la rue Peel et Crescent sont prêt à tout pour conserver les quelques 500 000 visiteurs qui viennent dans leur rue à chaque course dont 35 000 de l’extérieur. Mais c’est trop tard, les pouvoirs public ont tranché.

Cette nouvelle apparaît comme la confirmation du lent déclin de Montréal dans la hiérarchie des villes canadiennes et mondiales. La visibilité de l’événement rivait tout de même 300 millions de téléspectateurs sur Montréal. Pendant ce temps, Toronto poursuit son ascension, en réouvrant son Art Gallery museum (novembre 2008) dessiné par Franck Guerry, et Vancouver se prépare à recevoir les JO d’hiver de 2010. Montréal number one, déjà dépasser par Toronto, va-t-elle devenir la troisième métropole caadienne ?

Quel nouvel événement ?

Le journaliste Réjean Tremblay insiste sur le deuil du plus grand événement pour Montréal, le plus lucratif aussi, « celui qui permettait à Montréal de rester dans le club select des métropoles de la Formule 1 avec Barcelone, Melbourne, Sao Paulo, Budapest, Singapore, Shangaï, Istanbul » (La Presse, 17 nov 08, p.3). En ce jour de défaite pour Montréal, le discours de la presse devient justifiant : il vaut mieux perdre le Grand Prix car l’opération n’est pas viable. Depuis 3 ans, les montréalais étaient déficitaire et l’an passé 10 millions d’euros ont été engloutis et devront être remboursé par le contribuable.

Les acteurs montréalais s’inquiètent aussi de l’après 2011 car même s’ils avaient réussi à sauver le Grand Prix sur un contrat de 3 ans, ils estiment qu’ils n’auraient pas pu être en concurrence financière face au « Dubaï et Shangaï de ce monde » (La Presse du 3 nov. 2008).

Il faut donc réfléchir à un autre événement d’ampleur internationale, ce que confirme le maire Tremblay le 16 novembre quand il s’inquiète de la perte de visibilité de sa ville et souhaite mobiliser des fonds pour un nouvel événement.

C’est l’occasion pour le chef de l’opposition montréalaise de relancer la candidature à l’Exposition universelle 2020. Depuis plusieurs semaines, il insiste pour proposer ce projet et ainsi faire mieux qu’Expo 67, l’événement qui a propulsé la ville au rang des métropoles internationales et qui suscite tant de nostalgie locale. Terre des hommes est symboliquement gravé comme le début de l’ascension montréalaise encouragée 9 ans plus tard par l’accueil des Jeux Olympiques d’été.

L’argument de l’opposition et de son chef de file Benoît Labonté, maire du quartier Ville-Marie, est le complet contrôle de l’Expo 2020 par les pouvoirs locaux, sans la dépendance d’anglais sans scrupules.

Autre proposition qui semble plus probable, c’est l’organisation d’une course Nascar pour occuper la piste. C’est une activité sportive qui plaît beaucoup aux états-uniens, même si le prestige est moins fort et surtout les retombées moindres. Après les JO et les championnats du monde de Foot, la F1 est l’événement le plus lucratif, or le NASCAR n’amènera pas de population aussi sophistiquée et dépensière. En plus, la course ferait alors concurrence à celle d’Indiannapolis, une référence en la matière.

Pour conserver la même clientèle, la mode, le cinéma ou plusieurs manifestations par an semblent être les seules pistes pour conserver les mêmes apports financiers. Les événements culturels sont assez nombreux dans la ville et il est possible qu’une quête sportive soit un meilleur choix (tennis ou natation) mais il reste à convaincre de nouveaux partenaires à bien vouloir venir à Montréal.

Marketing local d'abord

Le Centre de Communication de l’Ouest, symboliquement situé au rez-de-chaussée de la Tour Bretagne à Nantes a lancé en septembre, à l’occasion de l’inauguration de ses nouveaux espaces, un concept multimédia inédit de promotion des marques du territoire. Considéré comme une « solution innovante de marketing territorial », ce nouvel outil est destiné à favoriser l’échange et à contribuer au rayonnement des marques de l’Ouest de la France (essentiellement nantaises).

Une vitrine multimédia de promotion des acteurs du territoire (entreprises, institutions, collectivités, médias et personnalités) est déployée sur 17 pans de murs qui forment une exposition. Les grandes filières économiques du territoire sont représentées par un visuel identitaire de 8m² sur lequel s’intègre un écran LCD haute définition. A l’écran s’animent des clips vidéo des marques présentées, invitant le visiteur à cliquer pour en savoir plus. L’entreprise choisie se dévoile de manière intuitive et interactive et « les interviews vidéo font du CCO le théâtre de la rencontre virtuelle entre le dirigeant d’entreprise et les 50 000 visiteurs annuels du CCO : décideurs du territoire, cadres d’entreprises, délégations étrangères, étudiants et jeunes actifs… ».

L’ensemble des présentations est actualisé en permanence mais pour qui ? La liste ci-dessus n’est-elle pas à hiérarchiser à l’envers : de nombreux demandeurs d’emplois intéressés et peu de décideurs ?

Cet outil publicitaire n’est-il pas majoritairement destiné à des visiteurs internes à Nantes. Ainsi, les 94 entreprises référencées et les 350 interviews consultables ne sont-ils pas un outil de communication intra-territoriale plutôt qu’un outil de marketing externe ? Et il n’est pas spécifié si les entreprises participantes ont payé ce qui serait alors un encart publicitaire.

Les 17 univers proposés résument l’économie locale avec une hiérarchie intéressante à étudier. Les 6 premières vitrines sont au rez-de-chaussée et proposent une dimension clairement territoriale.

La première vitrine « Patrimoine, culture, tourisme : Pour célébrer l’art de vivre » est l’occasion de ratisser large les structures touristiques qui participent à cette mise en visibilité. Les Bateaux Nantais, le CDT de LA, Le Lieu Unique/Estuaire ou le groupe Lucien Barrière de La Baule. Le pôle nantais est donc large.

La seconde vitrine est la plus globale et de nombreux symboles la composent (fig.xxx). Intitulée « Nantes Métropole : L’envie de vivre ensemble », elle propose de nombreux éléments qui spécifient Nantes et l’orientent comme une marque. Il y a là un potentiel pour faire avec Nantes du branding territorial.

Le CG 44 a le droit à sa propre vitrine tandis que les autres CG de la région doivent s’en partager une avec Saint-Nazaire ce qui renforce la centralité urbaine et marque une hiérarchie. La région est située à l’étage, telle une institution éloignée des intérêts spécifiquement nantais.

Les vitrines « Communication & TIC » et « Médias » sont présentées comme soutien à la dimension territoriale ce qui atténue le rôle neutre de ces derniers. Cette dernière vitrine ne se cantonne pas à Nantes mais rassemble de multiples médias locaux : Alouette, Angers 7, Club de la presse Nantes Atlantique, Entreprises 44, Fidélité, France Bleu Loire Océan, France 3 Ouest & Pays de la Loire, Hit West, La Lettre API, Le Journal des Entreprises, Les Journaux de l’Ouest, Le Télégramme, Maville.com, Médias Côte Ouest, Millénaire Presse, Nantes 7, Nouvel Ouest, Ouest-France, Plein Ouest, Presse-Océan, Télénantes, 20 minutes Nantes.

Les autres vitrines à l’étage sont plutôt sectorielles et mises ensemble, elles composent une société économique. Elles sont dans l’ordre :

- Energie, environnement, BTP : "Pour bâtir un monde durable",

- Agro-alimentaire : "Pour nourrir la planète",

- Univers de la famille : "Pour créer le bien-être",

- Enseignement et recherche : "Pour faire grandir les savoirs" (l’école des Mines de Nantes, ou l’école Nationale Vétérinaire de Nantes témoignent d’une spécificité territoriale),

- Vie économique et société : "Pour rassembler les forces vives" met en avant le techopole Atlanpole, la cité internationale des Congrès, la Chambre de Métiers et de l’Artisanat de Loire-Atlantique ; ainsi qu’un espace pour découvrir « 50 Personnalités emblématiques de l’Ouest »,

- Finance, banque, assurance : "Pour accompagner l'ambition économique",

- Transport : "Pour accélérer les échanges" rassemble entre autre l’aéroport international Nantes Atlantique et le port autonome Nantes Saint-Nazaire,

- Industrie et défense : "Pour exporter l'excellence" décrit notamment Airbus Nantes et Saint-Nazaire, ou l’Armée de Terre,

Les trois derniers sont particuliers. Pourquoi le Conseil régional est-il placé seulement ici ? L’avant-dernière vitrine Service : "Pour répondre à toutes les attentes" rassemble notamment des sociétés d’emplois ou d’immobilier, ce qui répond au public nouvellement arrivé sur Nantes. La dernière vitrine est Atlanbois : "Le bois, source d'inspiration". Que fait-elle là ? Là où d’autres coins de France se placent comme spécialiste du bois, Nantes en fait mention mais discrètement, peut-être n’est-ce pas assez citadin ou bien la spécialité n’est pas assez forte.

En bilan, la Région aurait dû être inversée avec « Com & TIC » mais cette dernière renforce l’aspect métropolitain, bien au contraire de la spécialité bois qu’il vaut mieux atténuer pour ne pas faire provincial. Les 50 portraits locaux sont l’occasion de fédérer et de valoriser les égos. Lorsque les journaux nationaux comme l’Express, Le point ou les Echos feront comme chaque année leur palmarès de ceux qui ont le pouvoir dans telle ou telle ville, le travail sera ainsi déjà maché.

Comme souvent, cet outil ne pourra pas être évalué dans sa dimension extra-locale, mais il semble bien tenir son rôle de marketing local. Bravo pour l’aspect fédératif du CCO qui se présente avec cet outil comme le CCN pour Nantes et ses alentours. D'ailleurs la virtine des productions locales présentent uniquement des éléments nantais dont le fameux petit LU.

Notoriété rennaise

Il est parfois possible d'entendre parler de la même ville moyenne d'Europe trois fois dans la même journée alors que l'on est sur un autre continent. mi-ovembre 2008, Rennes est citée trois fois dans les médias de Montréal.

- Dans les journaux gratuits disponibles dans le métro montréalais, un article traitant de la mise en place du système BIXI, un service public d'utilisation de vélo dans la ville, est l'occasion de signaler que la première ville dans le monde a avoir mis en place ce service est Rennes en 1998.
- Un autre journal précise dans la page People que l'actrice Salma Hayek est peut-être de nouveau en couple avec le fils du milliardaire François Pinault. En effet, on les aurait vu assister à un match de "soccer" à Rennes. La brève de 3 lignes ne spécifie pas que François Pinault est le principal sponsor de l'équipe de football rennaise.
- La télévision publique Radio-Canada s'intéresse le même jour à la journée d'une lycéenne québécoise qui participe au jury du prix Goncourt des lycéens qui se tient chaque année à Rennes dans le restaurant La Chope. Des images de Rennes sont mises en perspectives pour montrer toute la grandeur de la ville mais le reportage qui filme les quais montre des bâtiments assez basiques qui mettent peu en avant Rennes (ce n'est pas le but du reportage non plus, d'ailleurs la ville n'est citée qu'une fois en tant que localisation de l'événement et la jeune québécoise est interviewée en tant que jury d'un prix littéraire, mais on ne sait rien de la ville).

Pour autant, on ne peut pas considérer que Rennes ait une notoriété qui dépasse l'Atlantique

De Super U à Leclerc… quid du Breton ?

Fin 2008, le supermarché U de Vern-sur-Seiche (35) s’agrandit et devient un hypermarché Leclerc. Ce centre commercial a la particularité d’avoir mis en place, dès sa création en 2005 une signalétique bilingue. Est-ce une opération de marketing territorial qui distingue le point de vente ou bien la volonté de soutenir la langue en perdition dans l’est de la Bretagne (où l’on a jamais parlé breton) ?
Dès l’entrée du centre commercial, le double affichage est soutenu par le label produit en Bretagne. Deux têtes de gondole situées près des caisses rassemblent les produits bretons (pas tous culinaires) entourés de fleurs de lys.
La langue bretonne est écrite sur les affiches visibles du supermaché dans chaque rayon, repris par les commerces alentours comme le coiffeur. Même à l’extérieur, l’aménagement urbain est pensé en breton (totem du supermarché situé sur le rond-point Triskell.
Toutefois, c’est davantage de la communication territoriale que du marketing, dans la mesure où l’on peut observer que l’affichage ponctuel est lui, uniquement en français (fig.3).

On comprend alors que la traduction bretonne a été faite lors de l’inauguration du centre commercial mais que depuis, les nouveaux panneaux sont uniquement en français. Cela peut se comprendre si l’on considère que la totalité de la clientèle lit le français, toutefois, un effort linguistique ne doit-il pas être pensé jusqu’au bout ?
Lors du changement d’enseigne en décembre 2008, reste à observer quelle place va être accordée aux écriteaux bretons ? Le rond-point du Triskell va-t-il être le seul reliquat de cette opération de communication ?

Moins de marketing urbain que de promotion territoriale

Analyse à partir de trois textes du site http://urbanites.rsr.ch

Le marketing urbain est une formule très usitée par les acteurs du territoire autant que par les chercheurs. Cette expression, a priori négative, est l’occasion de dénigrer collectivement les abus de ceux qui ont le pouvoir et qui essaieraient d’orienter la pensée. Non, les significations de chacun sur la ville ne seraient pas influençables et chacun doit considérer l’espace urbain selon la pratique qu’il en a et les représentations qu’il s’en fait. Formuler l’expression « marketing urbain » est l’occasion de fédérer le groupe contre l’idée de manipulation.
Pour autant, le marketing urbain n’est pas si pratiqué qu’il n’y paraît. Ce sont davantage plusieurs formes de promotion liées au territoire qui sont produites. A partir de la définition du marketing construite par les chercheurs en sciences de gestion (Valérie Girard ou Patrice Noisette) et parfois reprises par des géographes comme George Benko, l’utilisation des 4P se réduit souvent essentiellement au quatrième pour l’objet territoire ou l’objet ville. C'est-à-dire le P « promotion » et toutes les actions publicitaires qui vont avec. Le marketing est une démarche dans laquelle deux entités au moins sont en recherche d’un accord. Dans le cas des villes, il peut s’agir des acteurs d’un territoire d’un côté, et de la population de l’autre, ou bien d’entreprises à attirer, des touristes ou encore des leaders d’opinions. Souvent, les opérations mises en place par les villes supposent qu’elles vont répondre à ces groupes sans pour autant les concerter.

Une communication territoriale plutôt unidirectionnelle
Certes, la communication a évolué pour tendre vers des actions de proximité et en cela, elle se rapproche du marketing, mais il est important de ne pas confondre les deux termes, l’un étant une forme de dialogue et l’autre non. C’est alors un abus de langage de parler de communication territoriale alors que souvent il s’agit d’information unidirectionnelle, une forme de propagande où les territoires, souvent des métropoles, sont mis en avant. Hélène Bailleul admet que l’image extra-territoriale est difficile à évaluer, ce qui cantonne les actions de marketing à une forme de pédagogie pour les acteurs locaux. Dans le cas des projets urbains, c’est l’acceptabilité sociale qui est visée. Nicolas Babey propose donc une évaluation restreinte à la dimension intra-territoriale d’une image, qui se resserre sur les discours des habitants et leurs aspirations. C’est donc bien la qualité de vie qui est étudiée dans son travail, « qualité de vie » et « image » étant synonymes car le premier terme est l’aspiration première qui fabrique le second.
Ces deux chercheurs ont l’avantage d’être des analystes, ce qui facilite une vision critique du marketing urbain. Dès que l’on est acteur d’un service public qui doit promouvoir le territoire, la tentation de la performativité est forte. Le pas n’est pas franchi par la direction du tourisme lausannois mais il s’en faut de peu pour relier les choix du positionnement territorial de Lausanne avec des résultats qui seront porteurs. Le texte est écrit au futur avec l’espoir que le lecteur le lise au présent.
En réalité, il est difficile d’évaluer les effets du discours lausannois (entamé depuis 2007 et accompagné d’opérations de renouvellement de la ville) sur ce que pensent ceux qui n’ont jamais pratiqué cette ville. Lausanne évoque probablement le calme, le lac au pied de la montagne et la neutralité suisse. On penserait aussi à l’argent suisse et éventuellement au CIO pour ceux qui le savent… mais les représentations sont elles plus développées ? Probablement que non et Lausanne doit déjà s’estimer heureuse que des mots viennent à l’esprit quand on évoque son nom. D'autant que la pratique de la ville peut remettre en cause cette impression de cadre de vie serein et à taille humaine (photo qui montre que le transport en commun lausannois défigure l'esthétique souhaitée par des touristes quand ils entrent dans la ville par la gare). Ainsi, le choix de quatre pôles d’excellence traduit bien l’idée de s’adresser d’abord, de manière indirecte, à la population locale afin de démontrer que Lausanne est une métropole dont l’action de développement est sur plusieurs fronts complémentaires. Sur les quatre pôles, un seul semble démarquer la ville de ses concurrentes mondiales : c’est l’atout du siège olympique, une spécificité territoriale, tandis que la quête de l’excellence scientifique et d’études supérieures est recherchée par de nombreux pôles (de la petite Rennes à la douce Montréal ou la puissante Boston). Quant aux deux derniers axes, toutes les villes l’ambitionnent en s’affichant métropoles ou villes culturelles, ou bien « sociales et solidaires ».

Paysage politique à Montréal

Le mardi 14 octobre, en plus d'une date de soutenance en France...,
les québécois votaient pour les élections fédérales.
Le paysage des rues est alors assailli d’affiches qui présentent les candidats. Elles sont simples : un visage et un slogan sur une affiche cartonnée qui est souvent accrochée à un lampadaire.
La visibilité des candidats passe par cette diffusion pêle-mêle dans la ville (fig.1). Là où la France impose des zonages réglementés afin que les têtes de candidats soient les unes à côté des autres sur les plaques prévues par chaque commune, les québécois ont plus de marge de liberté même si parmi les règles à respecter, il faut retirer les affiches très vite après le vote.

Il n'en est rien. Au mois de novembre, la plupart des affiches des premières élections sont toujours présentes dans le paysage urbain. La presse signale que même le parti Vert pollue la ville en laissant ses pancartes. Rien ne bouge au fil des jours et chaque acteur de ce problème se défend comme il peut :
- les militants qui affichent l'information politique ont disparu le lendemain de l'élection et même un parti affirme que des gens ont relocalisés les pancartes ailleurs pour nuire !,
- les mairies d'arrondissements disent qu'elles vont envoyer un courrier à chaque parti puis sanctionner en les enlevant elle-même pour ensuite envoyer la facture aux partis.


Entre le 14 octobre et le 8 décembre, les québécois votent deux fois : pour les élections fédérales et provinciales. Le problème est que les campagne politiques provinciales ont démarré dans la foulée pour le vote du 8 décembre. Et c'est reparti pour de nouvelles affiches qui s'imposent sur les précédentes (qui sont enfin retirées).
Dès l'annonce des secondes élections, des pancartes étaient installées le lendemain, comme pour montrer que les partis sont réactifs, ont déjà un programme politique pour ces élections qui n'étaient pas prévues.
Les messages sont pauvres, composés d'un visage et d'un slogan avec le logo du parti. C'est l'affichage du chef de file qui compte (Pauline Marois d'un côté et Jean Charest de l'autre), même si le thème de l'économie, crise financière oblige, est mis en avant par le PLQ, avec son slogan "Oui, l'économie d'abord".

Ces affiches témoignent de l'importance accordée à l'image du chef au détriment des idées politiques selon le psychologue Pierre Faubert.
Reste que les citoyens qui s'orientent de plus en plus à voter impulsivement selon l'esthétique, le visuel, ont tout de même la capacité de jouer avec les pancartes imposées par les politiques.


Avant les élections, nombreuses sont les pancartes qui ridiculisent les candidats.

Après les élections, elles sont détournées en moulin à vent.
En effet, outre les capacités des citoyens à décliner les affiches qui sont accessibles avec un crayon ou tout instrument de modification, la pollution visuelle agace l’habitant du quartier. Ainsi, sur la place de la station de métro Mont-Royal, quelqu’un a tordu le cou à tous les candidats (fig.2) en montrant bien tout le vent que peuvent déplacer les discours politiques. Les moulins à vents tournent à Montréal, au détriment des discours politiques qui ne tournent plus ronds et ne convainquent plus.

Pour la troisième fois, le professeur Nelu Wolfensohn de l'école du Design de l'UQAM propose un concours parmi les étudiants pour renouveler les pancartes. Il critique les actuelles affiches (clic) tandis que certains candidats utilisent ces pancartes pour se faire remarquer. Ainsi, un candidat du parti Vert a fabriqué lui même 8 pancartes avec un marqueur noir, écrites sur l'endos de pancartes d'anciennes pancartes. Elles sont situées sur des lieux qui concernent le contenu du messages (piste cyclable, sortie d'autoroute, fermeture de biblothèque...) et sont écrites soit en anglais, soit en français. C'est là que la loi 101 est questionnée puisqu'elle oblige que le français soit la langue imposée sur tout type de support. Mais le candidat est sauvé, la liberté d'expression s'impose et l'anglais comme seule langue (3 pancartes sur les 8) est autorisé.

Détournement publicitaire

Les publicités à Montréal sont en partie diffusées dans ce que l’on appelle en France des colonnes Morris. De nombreuses ornent les rues de Paris sous un modèle esthétique évoquant le XIXème siècle. Celles de Montréal ont un titre qui rappelle les différents quartiers de la ville ou bien les stations de métro.

Une de ces colonnes est située à l’entrée de la station Université de Montréal et porte donc son nom. L’avantage pour l’institution universitaire est que la publicité qui y est placée fin octobre peut éventuellement concerner l’université. En effet, en réalité, l’annonceur est l’ordre des comptables du Québec, mais la manière dont est construit le visuel publicitaire et le message, laisse penser que c’est l’UdeM qui parle.

Boston, la ville historique

La perception qu'un européen peut avoir de Boston quand il y arrive par la route est celle d'une vieille ville. Tout y est ancien, en tout cas, rien n'y est récent.
Les couleurs dominantes sont rouille, bordeaux foncé, gris, marron, ce qui, pour une première vue de la skyline, donne une vision terne à la ville, même par temps de soleil.
Kevin Lynch, avec son ouvrage « L’image de la cité », a démontré l’importance de la lisibilité d’une ville. Le paysage urbain est lisible grâce aux quartiers, points de repère et voies de communication et leur combinaison en un schéma d’ensemble. Son livre examine les qualités visuelles des villes américaines en en étudiant la représentation mentale chez ses habitants. Selon son étude, quelle que soit la ville (New-Jersey et Los Angeles sont aussi étudiées), les habitants accordent une importance aux panoramas car ils relient plusieurs éléments dispersés et donnent un ensemble cohérent car visible instantanément. Les contrastes sont alors aisément identifiables.
A Boston, parmi les différents éléments qui composent l’image mentale de la ville (les voies, les limites, les quartiers, les nœuds, les points de repère…), ce sont les quartiers qui structurent la ville selon l’auteur (un quartier est déterminé par l’existence de plusieurs éléments distinctifs comme le type de bâti, de décoration, d’activités, de classes sociales, d’éthnies...). K. Lynch parle de la force thématique des différents quartiers de Boston qui constitue l’élément fondamental de l’image de la ville afin de rassurer, et qui compensent l’absence de clarté de la voirie (1960, p.77). Toutefois, à l’inverse de la clarté du découpage des quartiers de nombreuses villes américaines, ceux de Boston sont certes fortement caractérisés mais les délimitations ne sont pas évidentes, probablement dues à l’évolution historique de l’une des premières villes du continent américain, sous un modèle européen concentrique.
Ce qu’il est intéressant de saisir, c’est la différence forte de perception entre l’européen et l’américain. Il semble que l’européen soit quelque peu déçu de Boston, ville aux couleurs foncées et tristes, avec aucun renouvellement urbain proposé. Seul le mémorial de l’holocauste est récent (et encore, 1995) mais les actuelles tours en construction ne sont pas imposantes et s’intègrent parfaitement dans la skyline sans la remettre en cause, sans faire évoluer la ville de manière flagrante. Marseille propose Euromed, Lyon propose Confluences, Nantes développe son île, Cleveland dispose du Rock and roll hall of fame and museum, Birmigham impose son Bull Ring… et Boston ancre sa particularité sur le patrimoine de la nouvelle Angleterre.
En effet, le point de vue des américains du nord sur Boston semble être la forte appréciation de cette ville historique qui conserve les traces du passé sans être menacée par des projets modernes. Nulle trace de modernisme à Boston, à l’image de son vieux métro et de son moche tramway. Boston, à travers sa freedom trail qui date de 1951, propose l’histoire de la nouvelle Angleterre en conservant un esprit ancien. Les américains aiment Boston pour ses traces d’histoire et parce que tout fait référence au passé, pour ces habitants du nouveau monde qui ne connaissent pas l’urbanisme médiéval. Boston est une ville touristique pour les américains.
Autre argument pour expliquer la non-visibilité des projets urbains de Boston, c'est le coût important du projet Big Dig. Débuté en 1985, ce projet d'autoroute souterraine parvient à 15 milliards de dollars aujourd'hui (le plus gros projet américain qui avait été estimé à 2,5 milliards) à cause de multiples péripéthies. Il avait l'ambition d'enfouir les principaux axes de déplacements de la ville. Difficile pour Boston de fabriquer de la visibilité avec de grosses dettes.

Montréal, ville universitaire

En octobre 2008, la presse montréalaise francophone traite de la place de l'UdeM, université de Montréal, dans les classements internationaux. Vient de tomber le classement du Times Higher Education qui situe l'UdeM parmi les 100 meilleurs universités du monde (91è, soit 2 places de mieux qu'en 2007). Via des articles de presse, que l'on retrouve dans la presse gratuite Métro, 24 heures, ou sous forme de publicité dans La Presse, une même trame cite aussi le classement de référence qu'est celui de l'université Jiao Tong de Shangai. L'UdeM y gagne 18 place en étant 133è.
L'argument de la langue, en cette semaine du sommet de la Francophonie organisée à Québec, est l'occasion de distinguer l'UdeM : Rares sont les universités non-anglophones a être bien classées, les premières universités françaises du classement de Shangai étant Paris VI (42è) et Paris XI (49è) qui gagne 3 places probablement grâce au prix nobel de physique remporté cet hiver par un de ces professeurs. L'UdeM serait donc particulièrement puissante puisqu'elle serait dévaluée par sa langue de travail qu'est le français.
D'une manière générale, les critères de classement sont peu favorables à la France : prix nobels du personnel et des anciens étudiants, les citations dans les revues (anglophones) les plus reconnues, le nombre d'articles dans les plus grandes revues scientifiques (toujours anglophones)... autant de critères considérés comme académiques, axés sur la productivité de la recherche. Une fois de plus, les classements s'orientent vers ce qui est le plus aisément mesurable dans un objectif de comparaison.

Mais dès que d'autres critères sont pris en compte, comme le nombre d'anciens élèves occupant des postes de dirigeants dans les 500 plus grandes entreprises mondiales, certes les universités US dominent toujours mais les universités françaises tiennent la dragée haute :
HEC France est 7è, l'ENA 10è, Science Po 11è, Polytechnique 15è et l'école des Mines, l'instigatrice de ce classement, est 20è. Ce classement s'intéresse à l'autre versant d'un pôle des universités en évaluant la formation estudiantine. Un seul critère est alors pris en compte et c'est l'université de Tokyo qui est en tête. Ce classement perd de son intérêt dès la 60è place (en deçà, les universités n'ont formées que 2 dirigeants), toutefois les quelques universités canadiennes concernées ne donnent pas de place à l'UdeM : Queen's university est 35è, execo avec Toronto, s'ensuivent Manitoba (88è), Western Ontario (89è), Saint-Anne College, Sherbrooke, Wilfried Laurier (212è execo)... Mais à l'échelle de la ville de Montréal, Concordia est classée 33è et Mc Gill est 347è. Les universités anglophones sauvent la mise.
C'est là la capacité des villes à rebondir sur les palmarès. Dans la presse locale, Montréal est annoncée comme
la seule métropole canadienne et l'une des rares dans le monde a avoir plusieurs universités dans le top 100 : "Ces résulats consolident donc la place de Montréal parmi les villes de savoir les plus dynamiques" se plaît à préciser la presse locale. Il est vrai que parmi les 4 universités montréalaises, il y aura toujours quelques arguments à mettre en avant selon l'angle de vue proposé.

Visibilité mondiale des villes françaises : Brest gagnante en 2008

Pour choisir parmi la liste des villes françaises qui semblent avoir un rayonnement européen, Google fait sa sélection. A travers son nouvel outil Google street view, les villes choisies mêlent Espace pratiqué et Espace médiatisé puisque les photos successives (tous les 10 mètres) des lieux urbains sont bien une médiatisation puissante à l'échelle mondiale de quelqu'un qui pratique la ville.

Grâce à une vue de 360° très malléable, l'internaute peut visiter la ville par un parcours photographique d'une grande qualité et d'une grande précision. A l'origine, ce programme était conçu en mai 2007 pour 5 villes américaines dont 3 qui ont des emblèmes territoriaux puissants : New York, San Francisco, Las Vegas ainsi que Miami et Denver. En août 2008, les Japonais et les Australiens ont pu voir leurs villes avant l'Europe à l'automne.
Les villes choisies sont Lille, Lyon, Marseille, Nice et Paris. Leurs emblèmes territoriaux parlent aussi aux internautes : la promenade des anglais, le Vieux-port marseillais, Fourvière... sont désormais visibles de près. Ce choix participe à distinguer certaines villes plutôt que d'autres auprès du reste du monde. Mais un événement de grande notoriété noie cette sélection dans un méandre de photographies de lieux ruraux français.
La Bretagne a aussi son lot de photo, comme des communes de Beslé, Guémené-Penfao, Pipriac... Sont-ce des métropoles dont l'aura dépasse les frontières françaises ? Ce sont juste des communes qui ont été sur le parcours du Tour de France 2008. Ainsi, Google street view propose la médiatisation des espaces pratiqués de Chateauroux, Pau, Nîmes, Montluçon ou Roanne.
Peuvent se greffer aux 5 grandes villes selectionnées, Nantes, Saint-Etienne et Grenoble, même si l'ensemble de l'espace urbain n'est pas concerné. Concernant la Bretagne, elle est assez bien représentée.
C'est une aubaine pour cette région qui a proposé une forte communication cet été en fédérant pour la première fois, plusieurs territoires autour de la marque Bretagne 2008, dont le logo ne semble pas avoir eu un fort succès (il n'est pas recensé sur l'internet, ce qui est un comble pour un logo territorial).
Brest, Saint-Brieuc, Saint-Malo et Vannes se retrouvent mises en image sur Google, au détriment de Rennes ou Quimper.

Concernant le Tour de France, Brest a créé un logo assez profilé qui, avec l'autre logo estival, celui de Brest 2008 l'événement maritime, forme une bonne visibilité médiatique extra-nationale. En 2008, Brest est le point de départ du Tour de France, accueille de magnifiques voiliers, tout comme Rouen, et voit sa ville mise en image sur Google.

Place aux cultures (2)... comme projet urbain

La place aux cultures est un projet qui s'inscrit dans le temps long.
Pour faire patienter la population rennaise, une exposition est proposée par la municipalité, présentant le projet urbain, en extérieur, au bord d'une bouche de métro. L'historique de la future place aux Cultures qui a porté le nom de place du Champs de Mars puis Esplanade Charles de Gaulle, est présenté avec une scénographie qui évoque le chantier urbain. Le contenu est produit par la direction de l'aménagement et de l'urbanisme tandis que la direction de la communication a conçu la présentation. 6 côtés présentés en deux triangles fermés, forment un cheminement d'informations telles que :
- auparavant la place était une prairie appartenant à un couvent,

- des foires aux bestiaux ou le cirque y ont tenu séances
,
- puis, les futurs projets sont présentés (le parking, la salle de spectacle, le multiplexe cinéma, le bâtiment Jeunesse...).

Le logo de la Ville de Rennes témoigne du rôle d'information publique de cette exposition extérieure qui, par son aspect "emplacement temporaire posé sur des planches", atténue l'attente du projet urbain dont la temporalité ne correspond pas aux souhaits des usagers. L'objectif premier est bien de présenter les futurs projets et l'allure de la future place. Ces images d'espaces en projet est mêlée à des informations historiques qui inscrivent l'exposition dans une chronologie d'une place toujours en évolution.
Les textes informatifs sont courts, ce qui donne envie de lire sur la ville. Les dates de livraison des bâtiments sont dépassés et sont une trace de mauvaise gestion des projets urbains. A Angers, la démarche est davantage poussée. Dans le cadre de la construction du tramway dans le paysage urbain (inauguration en 2010), un relais info-chantier est conçu en tant que point d’information à propos de l’état d’avancement du projet urbain. L’objectif est de rassurer les riverains grâce à une relation de proximité. Un mobilier d’information recense tous les renseignements et incarne le projet dans son ensemble pour ne pas associer la présence des médiateurs uniquement à des difficultés. Ils doivent aussi être les relais de la valorisation du projet tramway dans le quartier. Des visites de chantier d’une à trois heures ; des événements de proximité lors de dates clés (premier coup de pioche des chantiers locaux, plantation du premier arbre, lors des fouilles archéologiques, pose du revêtement définitif…) ; ou des journées entières avec les médiateurs (auprès des scolaires et des entreprises et institutions proches du chantier, avec notamment la rediffusion des outils TIC) sont des actions envisagées dans le plan de communication 2008. Une exposition est diffusée en 2007 dans une salle en centre-ville, dissociée du lieu du projet urbain (un trajet qui traverse la ville). Au sein de l'exposition, la scénographie précise les adaptations par rapports aux films initiaux, ce qui est une manière d'atténuer la difficile gestion des évolutions de projets urbains.

Place aux cultures (1)... comme centralité

Afin d’attirer les acteurs culturels et entraîner le développement local, l’image d’une ville peut reposer à la fois sur une politique de grandes institutions (la notoriété des grands équipements et la qualité de leur programmation donnent une hiérarchie des villes), une politique culturelle avant-gardiste (les nouvelles formes artistiques et culturelles comme les espaces non-conventionnels, les friches, les squatts, les arts de la rue, les cultures urbaines qui donnent une image d’acteurs hors-champ institutionnel) et une volonté de rayonnement (grâce à la présence d’acteurs culturels insérés dans les réseaux internationaux et l’implication des acteurs dans les projets de dimension au moins nationale). Les pratiques non institutionnelles sont reconnues comme critères de vitalité d’une ville et de son public (Vivant, 2007). Selon le cabinet d’étude TMO (2002) Grâce à la combinaison des champs universitaire et culturel, la notoriété culturelle du territoire rennais se construit à partir de :

- l’antériorité de Rennes en matière de dynamisme culturel (une des premières Maisons de la Culture, un Centre chorégraphique national, un festival de renommée nationale depuis 1978, une des premières inaugurations d’un commerce FNAC et d’un VIRGIN en France),

- la présence de grands équipements (opéra, Théâtre national de Bretagne, musée

des Beaux-arts, centre d’art contemporain, conservatoire de Région),

- la notoriété ou l’image de plusieurs lieux culturels autres que les lieux institutionnels. L’UBU, l’Aire-Libre, l’Arvor, la Péniche-Spectacles, Le Jardin Moderne, la Criée… sont autant de lieux qui valorisent ceux qui les citent,

- la présence d’acteurs connus ou dont le travail est apprécié (artistes ou gestionnaires),

- les grands événements (Transmusicales, Tombées de la Nuit, Travelling et Mettre en scène, ainsi que Mythos et Marmaille permettent de parler des 3T et des 3M),

- l’existence d’équipements de quartiers (Triangle, Rallye, Paillette, Tambour),

- la reconnaissance d’un rôle régional grâce à une offre culturelle large et diffusée.

Mais les faiblesses de Rennes sont liées à sa petite taille : une ville moyenne et peu cosmopolite ne rime pas avec la citadinité culturelle. Les grandes villes sont associées à l’émergence de nouvelles formes de cultures urbaines, lesquelles se nourrissent du vécu des cités et de la rencontre de logiques et de traditions culturelles différentes, et plus particulièrement du métissage des cultures. Les autres faiblesses portent sur les arts plastiques, la faible politique de résidences d’artistes, une politique d’équipement insuffisante, un manque de passerelles entre le monde de la culture et les technologies, ce qui aboutit d’une manière générale à une image qui vieillit si elle ne repose pas sur des actions concrètes. Ces faiblesses ont trouvé un écho avec des efforts incarnés par la place aux Cultures. Ce projet urbain achevé en 2008 donne une place centrale à la culture au sein de Rennes.

Avec les rénovations urbaines de la décennie 2000, les activités culturelles ont déserté le centre-ville. Des manifestations qui ont fait la renommée de Rennes, comme les Transmusicales, en ont été écartées. De surcroît, avec l’ouverture de salles de spectacles à Brest, Caen ou Nantes, les tournées d’artistes sont moindres. La salle provisoire du Musikhall, installée à l’extérieur de la ville au parc des expositions, ne réfère pas à la centralité urbaine. Pour contrer cette situation, la restructuration de l’esplanade du centre-ville renommée Place aux Cultures s’appuie sur des équipements existants (les Champs-Libres ouverts en 2006, l’espace jeunesse le 4 bis ouvert en 2007, la salle de spectacle le Liberté réouverte en 2008, le complexe cinématographique dessiné par Christian de Portzamparc, ouvert en 2008) pour créer le plus important pôle culturel de l’agglomération, en plein cœur de ville, non loin du TNB.

A partir de la montée de la Culture dans la fabrication de l’image rennaise au fil des 25 années de promotion territoriale, à défaut d’être quantifiée comme outil de développement territorial, elle participe aux valeurs de la ville. Les conditions sont rassemblées pour mesurer l’impact d’un positionnement culturel rennais, impulsé par le développement des images événementielles qui agissent de manière plus ou moins indirecte sur la production d’image (Barthon, Garat, Gravari-Barbas & Veschambre, 2007).